XLVIIIe congrès de la Shmesp
– Jérusalem, 3-8 mai 2017

Les vivants et les morts dans les sociétés médiévales

Argumentaire

La thématique proposée pour le XLVIIIe congrès de la SHMESP s’inscrit dans une solide tradition de l’historiographie française, marquée à la fois par des ouvrages audacieux et par de riches synthèses. Les relations entre les vivants et les morts n’ont cessé d’intéresser les travaux des médiévistes, en histoire comme en archéologie, et ces questionnements, forgés pour l’étude de l’Occident médiéval, ont également gagné les recherches portant sur d’autres aires culturelles.

La tenue du XLVIIIe congrès de la SHMESP à Jérusalem, ville-sanctuaire et ville-cimetière, au coeur des croyances et des attentes eschatologiques des trois grandes traditions monothéistes, est une invitation à reposer la question des relations entre les vivants et les morts dans les sociétés médiévales. Moins que la mort elle-même, qui a déjà fait l’objet du congrès de 1975, il s’agira d’interroger dans ses multiples dimensions le commerce que les vivants entretenaient avec leurs morts, l’aller-retour entre le temps et l’espace propres aux uns et aux autres, le dialogue outre-tombe qui fondait la mémoire d’une communauté, interrogeait ses croyances quant aux lieux de l’au-delà et au devenir du corps et de l’âme, et consolidait ses peurs ou ses espérances. Les travaux du congrès feront une large part aux apports de l’archéologie funéraire et à la comparaison des situations historiques entre les chrétientés (latine, grecque, orientales), les communautés juives d’Orient et d’Occident, et l’Islam.

Les communications proposées s’inscriront dans l’un ou l’autre des trois axes suivants :

Axe 1. L’espace des morts. Si la question de la formation du cimetière et celle de ses usages sociaux, en ville comme au village, ont récemment fait l’objet de travaux importants (d’archéologues et d’historiens) concernant l’Occident médiéval, il faudra s’interroger sur les dynamiques complexes qui ont mené au modèle cimitérial, ainsi que sur les autres espaces dévolus aux morts (inhumation ad sanctos, dans l’église, monuments funéraires indépendants…). L’étude des nécropoles des grandes villes d’Islam offrira une comparaison précieuse. On pourra également s’intéresser aux espaces funéraires des communautés minoritaires (cimetières juifs en Occident et à Byzance, cimetières juifs et chrétiens – latins et orientaux – en Islam), aux sépultures de crise, aux lieux de relégation funéraire des exclus du cimetière (hérétiques, bannis, lépreux…), ainsi qu’aux formes de privation de sépulture. L’espace des morts sera envisagé dans sa relation avec l’habitat, mais aussi avec le temps des vivants : visites aux tombeaux (des proches ou de morts illustres), à l’image de la pratique de la ziyara en Islam ; entretien des cimetières, fréquentation et service des sanctuaires à vocation funéraire.

Axe 2. Le souci des vivants. Renversant la proposition du « souci des morts », on explorera dans ses multiples dimensions la prise en compte/en charge de la mort et des morts par les vivants et les implications aussi bien culturelles que sociales de cette préoccupation. Dans cette perspective, on s’intéressera par exemple à la pratique du testament comme anticipation des relations entre les vivants et les morts, au rituel des funérailles (sa liturgie, son décorum, ses comportements codifiés, ses représentations). La question du deuil, posée de manière nouvelle par l’histoire des émotions et des sensibilités, retiendra également l’attention, sans négliger ses dimensions rituelles et morales. La prise en charge matérielle et spirituelle du corps des défunts sera envisagée dans la diversité de ses pratiques et de ses modalités (familiales, communautaires ou confraternelles). À l’articulation du souci des vivants et du souci des morts, la question de la mémoire des défunts, de son institutionalisation et de son entretien sera posée dans la diversité de ses cadres sociaux. L’étude des donations pieuses associées à la commémoraison des morts et au salut de leur âme, richement documentée en Occident, sera envisagée également, dans une perspective comparatiste, dans le cadre du waqf en Islam ou du heqdesh dans le judaïsme.

Axe 3. Les temps de l’au-delà. Le colloque ininterrompu qui unit les vivants et les morts par-delà la tombe, ou par son intermédiaire, sera abordé selon ses multiples temporalités : temps des revenants, temps suspendu dans l’attente de la Résurrection, temps aboli dans la représentation des Derniers Temps. Les travaux du congrès feront une place particulière au rôle central de Jérusalem et des lieux saints, dans la spéculation sur la Fin des Temps et à leur traduction concrète dans l’espace et l’histoire. Dans une perspective comparatiste, les questions du dialogue des vivants et des morts, de l’attente des Derniers Temps et de la dévotion aux lieux saints seront également abordées du point de vue des pratiques et des croyances chrétiennes, juives et musulmanes.

 

Livret du congrès

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